Voici trois films passés au London Film Festival qui valent sûrement le détour. L’un sort en salles bientôt, un autre en début d’année prochaine, et le troisième sera probablement disponible en streaming Ce sera mon avant-dernier article puisque le festival finit dans un jour à l’instant où j’écris ces lignes (et terminé depuis quelques jours au moment de publier).
The Front Runner
(sortie 16 janvier 2019)
Basée sur l’histoire vraie du sénateur Gary Hart du Colorado, cet homme politique a subi de plein fouet le changement de l’approche des médias sur la vie privée. Candidat à la présidentielle de 1988, alors que les sondages le plaçaient comme favori, une liaison de Hart est révélée au grand public. On le méprise et on l’adore, un politicien parfait comme sujet de biopic.
Jason Reitman s’attaque à la politique dans son dernier film, et le réalisateur plus connu pour ses drames de vie comme Juno, In the Air ou encore Demolition fournit un bel effort qui a pourtant un goût d’inachevé. The Front Runner présente un casting cinq étoiles avec un Hugh Jackman très convaincant en politicien aux valeurs progressistes et homme proche du peuple et une Vera Farmiga en femme réservée. J.K. Simmons est toujours aussi grinçant et Mamoudou Athie mérite carrément d’être plus connu.
Impossible de le nier, de nombreux sujets importants sont soulevés, l’intégrité des médias, l’éthique des journalistes, la place des hommes de pouvoir et notamment leur impact sur les femmes, l’empiètement sur la vie privée d’une personne publique… mais j’ai trouvé qu’il n’y avait aucune subtilité dans ces messages. Alors oui, j’ai quand même bien aimé le personnage interprété par Molly Ephraim, une Irene Kelly seule femme au milieu de l’équipe de Hart. Bien entendu, c’est elle qui a un tant soit peu d’empathie envers l’amante de l’histoire. Pour le coup, j’ai trouvé son rôle et celui de l’épouse de Hart très unidimensionnels.
Le Washington Post occupe une place de choix dans le film également, toutefois après The Post, sa présence sonne un peu faux. Et d’ailleurs, The Front Runner n’arrive pas à faire monter la tension que dégagent certains drames politiques comme Les Marches du pouvoir ou même Spotlight. Et ça retombe comme un soufflé en deux minutes. Puis surtout, d’accord c’est un film qui se veut objectif ou du moins impartial, mais le but de ces drames politiques n’est-il pas de prendre parti et de dénoncer un fait ? Car si c’est ça, The Front Runner est passé à côté d’un gros potentiel.
Seule la vie…
(sortie 31 octobre 2019)
Seule la vie a un titre presque philosophique pour le film tant attendu de Dan Fogelman, le créateur de This Is Us (et Galavant) ou encore le scénariste de Crazy, Stupid, Love. Ça donne déjà une bonne idée de ce que peut être Seule la vie. Un film chorale sur comment toujours essayer de surmonter les coups durs qui tombent sur votre chemin avec de nombreuses stars comme Olivia Wilde, Oscar Isaac, Annette Bening, Antonio Banderas, Olivia Cooke, Mandy Patinkin, Laia Costa… oui, j’ai nommé quasiment tout le monde.
Divisé en plusieurs chapitres suivant plusieurs héros, il y a clairement des arcs plus attachants que d’autres (spoiler alert : pour moi, ce n’est clairement pas le premier). Gardant la mort comme fil rouge tout au long des différentes pastilles de vies, Life Itself a la grâce de ne jamais tomber dans le mélo. Cependant, même si concrètement les transitions paraissent logiques et les arcs connectés les uns aux autres, j’ai trouvé que ça n’avait vraiment aucun sens. Et puis c’était un peu long. Alors ça tire un peu la larmichette, mais pas tant que ça.
En revanche, si j’ai trouvé un point excellent dans ce film, c’est le concept même de narrateur non-fiable. Mais son application est complètement ratée dans Life Itself. Il ne fait que prendre le spectateur pour une andouille et parle bien trop. Ça ne me dérange pas en soi que toute la malchance du monde tombe sur une personne et que c’est ainsi qu’est sa destinée, mais ce qui me gêne un peu, c’est que tout ce malheur résonne dans le vide. Fogelman a raté son coup là…
Support the Girls
(sortie inconnue)
Pas de date de sortie actuellement concernant le film pour lequel Regina Hall est nommée pour un Gotham Awards (la cérémonie récompensant les films indépendants). Support the Girls suit le quotidien de serveuses et de leur manager dans un restaurant d’une chaîne similaire à Hooters (où les serveuses sont légèrement habillées). Sur le papier, la comédie dramatique semble arriver à point nommé dans un environnement #MeToo. Et même s’il y a bien des maladresses propres à certains films indépendants, l’ensemble brille de solidarité féminine, de charme et de naturel.
C’est intéressant de voir la différence de perspective des employées et de ce avec quoi les médias nous rabâchent les oreilles actuellement. Je ne dis pas que ce sont deux sons de cloche complètement dissonants mais entre la réalité de ce qui est vécu et ce qui est combattu, il y a encore du chemin. Pour dire à quel point la comédie dramatique fait mouche, j’ai cru que c’était une femme qui l’avait écrite, mais pourtant, non, c’est bel et bien un homme, Andrew Bujalski qui réalise également le film. Ce n’est pas toujours drôle et parfois ça blesse même. Pas de male gazing ici, au contraire la caméra s’approche plus des visages des actrices pour capturer leurs émotions plutôt que d’autres atouts.
Regina Hall a le vent en poupe ces derniers temps. Après le hit qu’a été Girls Trip, sa présence dans The Hate U Give et son premier rôle incroyable ici, je dirais que sa carrière atteint un tournant déterminant et j’ai hâte de voir Black Monday (oui, aussi pour Andrew Rannells). Elle porte vraiment le film même si les actrices secondaires (Junglepussy la rappeuse et Haley Lu Richardson notamment) s’en sortent avec les honneurs. Et on peut parler plus d’ensemble que d’autre chose.
Malheureusement, ce film ne sortira probablement jamais en France mais sera probablement disponible sous peu sur les plateformes de streaming.