La qualité des manga (parenthèse, je suis partisane de l’orthographe manga invariable, juste pour info) tout comme celle des séries a vraiment évolué positivement ces dernières années. Je ne sais pas si c’est moi qui suis plus exigeante ou si l’offre est devenue tellement grande qu’il est difficile de ne pas trouver une bonne série. En tout cas, la diversité est telle que je doute que quelqu’un puisse dire « je n’aime pas les manga car c’est pas bien écrit… » ou autre généralité de ce genre. Bon, si c’est une question de format, c’est une autre histoire.
Après les animes, voici une petite sélection de manga à découvrir si ce n’est déjà fait.
Arte
« Parlez-moi de Florence et de la Renaissance. Parlez-moi de Bramante et de L’Enfer de Dante… » (petite réf à Notre-Dame de Paris, bonjour) eh bien c’est exactement ce qu’Arte fait. La jeune Arte provient d’une bonne famille aristocrate qui n’en a que faire des affaires de cœur et de la pression maternelle pour qu’elle se marie (et celle de la société qui la pousse à profiter de sa position). Non, Arte aime l’art, veut devenir peintre, malgré son net désavantage d’être née femme florentine lors de la Renaissance au XVIe siècle.
La force d’Arte, outre de dépasser les conventions de l’époque, c’est son optimisme à toute épreuve. Oui, notre héroïne est naïve, mais sa naïveté et sa détermination rappellent les personnages féminins les plus inspirants (hello Leslie Knope, hello Kimmy Schmidt). Donc mettez une héroïne prête à tout pour sa passion, saupoudrez de décors italiens et d’artistes-peintres, rajoutez une pincée de diktats sexistes, et vous obtenez Arte, un manga dessiné très proprement et qui va vous faire voyager. Il y a une certaine fraîcheur dans cette lecture qui rend l’ensemble bien plus agréable à lire qu’un froid et bien dessiné Cesare (mentionné plus bas) par exemple.
Chez nous, la série est éditée par Komikku, maison qui n’existait pas quand j’étais jeune (ça ne me rajeunit pas), apparue en 2012 et qui a sorti plusieurs de mes titres favoris (comme Le maître des livres). Même si l’héroïne est une jeune femme, ça ne veut pas dire qu’il s’agit d’un shojo pour autant. Il me semble qu’Arte est catégorisé comme seinen (manga pour adulte) d’ailleurs. Arte ne passe pas son temps à penser à la romance, elle est là pour bosser sa peinture, okay ?!
Bride Stories
Vous connaissez peut-être Emma, ce manga qui suit une domestique en Angleterre victorienne ? Eh bien, Kaoru Mori signe à nouveau une série avec des héroïnes passionnantes. Mais cette fois-ci, adieu l’Angleterre, bienvenue en Asie centrale sur la route de la soie. Amir est promise à Karluk, de 12 ans son cadet. Elle quitte sa tribu de guerriers pour rejoindre celle de son futur époux beaucoup plus marchande. Les différences culturelles même au sein d’un même peuple sont grandes, et tant Amir que sa famille d’adoption, tous vont devoir faire des efforts pour se familiariser aux changements.
Si on suit principalement les aventures d’Amir, quelques interruptions s’opèrent avec des autres « mariées » ainsi qu’avec un aventurier anglais chargé de rapporter ses péripéties au gouvernement. Grâce aux voyages commerciaux effectués par la famille de Karluk, le lecteur va découvrir la route de la soie avec ses points d’intérêts, ses processus et plein de détails. Car oui, Kaoru Mori dessine peut-être suivant son imagination (elle n’était jamais allée en Angleterre par exemple au temps d’Emma), mais son imagination est puissante.
Les secrets racontés au coin de la laverie, les broderies obligatoires pour préparer sa dot… les traditions des nomades de cette région d’Asie centrale m’étant complètement inconnues, tout semble nouveau. Bride Stories réussit à rendre attractives les steppes arides de la région.
Cesare
Encore l’Italie, mais voici les Médicis et les Borgia dans des intrigues formées dans les grandes écoles florentines, de Pise et de Bologne. Cette fois-ci, c’est le phénomène inverse d’Arte. On va suivre le jeune Angelo, issu d’un milieu modeste, qui va rencontrer au fil de ses études les grands de ce monde, dont Cesare Borgia, celui qui n’a jamais pu être pape. Oui, le fameux Borgia dépeint dans plusieurs adaptations télévisées qui a fait tremblé le Vatican rien qu’avec son nom.
Ce manga là est très riche. Riche en détails, en maîtrise, en paroles. Il faut s’accrocher parfois pour suivre leurs joutes verbales mais c’est aussi ce qui fait sa force. Encore une fois, la véracité historique doit passer au second plan, mais qu’importe, nous voilà plongés en Italie entre complots et jeux de pouvoirs politiques, tout ça décortiqué par un Angelo aussi néophyte que moi sur la situation.
Fuyumi Sorio crée un protagoniste hyper charismatique en dessinant Cesare, et rien que pour ça, le pari est complètement gagné. Ainsi, la dévotion de certains personnages envers ce héros malgré lui paraît entièrement justifiée et j’ai presque envie de dire que je me rajoute à la secte. Vous avez déjà eu un manager que vous respectiez intellectuellement et personnellement ? Je pense que Cesare vient de ce moule-là. En revanche, tout comme Bride Stories, faut attendre 1000 ans avant qu’un nouveau tome sorte.
J’ai tenté Reine d’Égypte également, mais le graphisme était trop lourd pour moi. Mon prochain essai sera Isabella Bird, centrée sur une exploratrice anglaise du XIXe.
Sachez que des Misérables ou des Conte de Monte-Cristo existent également, et que ça fait toujours plaisir à lire même si on connait déjà l’histoire. Ironiquement ce que j’apprécie dans tous ces titres c’est le côté un peu utopique de ce qu’étaient les époques décrites. Je ne dis pas que ça manque de recherche, je dis juste que c’est très idéalisé. Et au final, ça ne fait pas de mal.